Portrait : Catherine Ormen, commissaire d’exposition

Au cours des mois de septembre et novembre 2013, les élèves de master 1 ont eu la chance de rencontrer Mme Catherine Ormen pour un cours introductif à l’histoire de la mode. Les silhouettes qui ont traversé les siècles sont analysées au regard de la société contemporaine du vêtement, des mœurs, de la place de la femme dans la hiérarchie sociale mais aussi de l’hygiène. A l’aide d’un diaporama d’images très fourni, Catherine Ormen montra aux élèves cette évolution, tout en leur communiquant sa passion de l’histoire et du vêtement.

Catherine Ormen

Catherine Ormen

TPO : Votre parcours atypique est une véritable inspiration. Pourriez-vous en tracer les grandes lignes ?

Après une année de Science Po – qui donne une bonne méthode de travail -, je me suis orientée vers ce que j’aimais : l’art et la mode. J’ai suivi les cours de l’Ecole du Louvre, y ai obtenu mon diplôme de muséologie et j’y au assis fait mon mémoire de recherche, mais parallèlement, j’ai suivi les cours du Studio Berçot (école de stylisme), ce qui m’a permis de travailler dans la mode auprès d’un créateur qui se lançait dans le prêt-à-porter de luxe et où il y avait tout à faire. Puis j’ai passé le concours de l’Ecole du Patrimoine lorsque cette école a été ouverte. C’est donc en tant que conservateur du patrimoine que j’ai eu la chance de débuter à Marseille où il y avait aussi tout à faire puisque la volonté de Maryline Bellieud-Vigouroux était de doter Marseille d’un musée de la Mode.
De fait, l’expérience a été très enrichissante pour moi car il s’agissait de former des collections et de présenter au public des expositions avant même que le musée soit ouvert sur la Canebière dans l’Espace Mode Méditerranée. La programmation était passionnante et l’animation du lieu le fut plus encore. Après les exposition Chanel qui avaient eu lieu au Château Borély puis au Bunkamura de Tokyo, après différentes autres manifestations telles que Madeleine Vionnet à la Vieille Charité, Erik Mortensen-Balmain au Palais Longchamp, c’est une exposition dédié à Yves Saint Laurent-Exotismes qui allait consacrer l’ouverture du musée… Il y eu eu bien d’autres après, dont ma préférée, une exposition “transversale”, intitulée “Corps drapés autour de la Méditerranée”. Et toutes ces expositions, bien entendu se complétaient de catalogues.
J’ai ensuite cédé la place à Olivier Saillard qui dirige maintenant le Palais Galliera à Paris, qui lui-même a laissé place à Sylvie Richoux. Aujourd’hui, c’est Nicolas Hatot qui dirige le musée de la Mode de Marseille.
L’expérience marseillaise a fait que j’ai pu intégrer les Arts Décoratifs à Paris, où je fus responsable du fonds mode XXe siècle et où la préparation de la réouverture du musée m’a fait mieux connaître la mode du XXe siècle. Car c’est un vrai bonheur que de pouvoir manipuler et étudier des pièces de Poiret, de Vionnet ou de grands couturiers aujourd’hui disparus… Comprendre comment est fait un vêtement, voir quelles en sont ses finitions, et pas seulement se contenter de regarder une belle image, est à mes yeux essentiel pour aborder l’histoire de la mode.
En 1998, je me suis éloignée des musées, mais pas de l’histoire de la mode : j’ai écrit des livres sur ce sujet tout en organisant, pour le Printemps notamment, des expositions pluridisciplinaires qui “surfaient” sur une tendance de la mode. Expositions événementielles qui m’ont sensibilisée à de nouvelles problématiques, telles que la communication et l’approche de publics nouveaux. J’ai aussi commencé à enseigner, ce qui est encore une autre forme de médiation de l’histoire de la mode – et pas la moins intéressante ! Et depuis quelques années, je note que la demande est en expansion ! L’histoire de la mode commence réellement à intéresser, et je ne peux que m’en réjouir : comment peut-on imaginer travailler dans le luxe ou dans la mode, sans avoir une connaissance minimale de l’histoire du domaine que l’on souhaite aborder ?
TPOComment avez-vous été amenée à participer à la formation des Métiers de la Mode et du textile ?
J’ai toujours suivi avec beaucoup d’attention les évolutions de l’Espace Mode Méditerranée, devenu aujourd’hui la Maison Méditerranéenne des Métiers de la Mode. Et comme j’aime beaucoup transmettre et aider à la découverte de l’histoire de la mode, mais plus généralement encore de l’histoire du goût – et donc aussi de l’histoire de la société – , j’ai répondu à la demande qui m’a été faite…
TPOPour les élèves, vos cours sont très intéressants et très denses puisque vous retracez l’histoire du vêtement en France en seulement 24h (si mes souvenirs sont bons). L’expérience est presque un challenge, quelles ont été vos impressions une fois les cours terminés ?
Je vous remercie pour votre appréciation qui me réjouit. Il s’agit en fait de 20 heures de cours réparties sur 4 journées. 20 heures pendant lesquelles je parle beaucoup et c’est épuisant ! Je montre aussi beaucoup d’images. Il s’agit en fait, pendant ces 20 heures, de souligner les évolutions de la silhouette et d’en expliquer les métamorphoses successives. Etape par étape, il s’agit aussi de situer la mode dans un contexte plus large… Ce cours est un squelette, une trame pour utiliser une métaphore textile, qui doit permettre de mémoriser une chronologie, et à partir des références que je donne tout au long du cours, d’approfondir telle ou telle partie… Ces cours ne sont donc qu’une introduction, et j’espère, une clé, qui permettra de mieux comprendre les références qui sont celles de la mode contemporaine. Et il me semble aussi que c’est une base indispensable pour ceux qui se destinent à la création car, généralement, la mode ré-invente plus qu’elle n’invente !
Interview par Zita Tari

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